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Tribune: Charfadine Galmaye Salimi, crée une nouvelle chronique des révélations sur Ali Abderamane Haggar

Ali Abderamane Haggar ou la boîte à idée de la dictature reconverti en marchand de savoir et prêcheur mondain du vivre ensemble.

« Ma famille paternelle est victime de petits coups perfides. L’un de mes oncles Abbo Idriss Haggar a été suspendu de son cantonnât sans ménagement. Le pays Zaguawa que je ne connais d’ailleurs pas bien (je suis né et j’ai grandi à Abéché parmi mes oncles maternels) est en train d’être démantelé dans son unité traditionnelle. La décentralisation sous la forme de fédération clanique est en train de s’opérer au Dar Zakhawa que mon père, après 59 ans de règne, avait laissé à sa mort. » Ces mots faits de complaintes et de frustrations sont de M. Ali Abderamane Haggar dans un ouvrage dont il n’en fait aujourd’hui quasiment pas la promotion, publié en 2009 et intitulé vaguement :  » Et demain le Tchad-Verbatim. »

Surtout, ces mots d’un homme plus inquiet par la petite chefferie de son oncle ou de la « fédération clanique » qui s’opérerait chez sa communauté sont loin de l’image de l’écrivain engagé et dépassant les clivages qu’il donne à longueur de journée entouré de sa vaste cour ; faits d’obligés et de désoeuvrés. L’homme a été pendant plus de 20 ans, la tête pensante du régime : Secrétaire Général de la présidence où il a institutionnalisé le népotisme et la corruption et surtout les détournements des biens publics quand il dirigea la Société Nationale Sucrière du Tchad, la défunte SONASUT.

J’imagine beaucoup de jeunes choqués d’apprendre que leur idole, charmeur et à l’apparence pieux, aux discours patriotiques et exigeants jusqu’à la caricature, puisse avoir dans un passé récent été emprisonné pour détournement de biens publics. Malheureusement, c’est ce qui arriva lors de la gestion catastrophique de la Société Nationale Sucrière par le « Docteur en planification »(sic) Ali Abderamane Haggar. L’ampleur du vol et de la mauvaise gestion furent telles que même Déby, d’habitude laxiste quand il s’agit de la « famille », s’en était ému et a laissé la justice condamné notre planificateur économique pour détournement de biens publics. Il a fallu une immense pression clanique pour que Déby ne cède et ne le gracie.

La SONASUT, elle, ne s’est pas remise de ce hold-up dont Alcapone serait lui-même mi jaloux mi admiratif. De plans sociaux en plans sociaux, le fleuron de notre industrie agro-alimentaire licenciera de milliers de travailleurs et sera bradée à la Somdia, une société française. Ali Abderamane Haggar a t-il remboursé l’argent du contribuable et demandé pardon au peuple Tchadien ? Rien n’est moins sûr.

Les années 2004 où le retour en grâce du « petit blanchisseur ».

La traversée du désert ne durera pas longtemps pour M. Haggar. Il sera de retour au moment où le régime est confronté à une importante fronde interne, dû notamment à un mécontentement des jeunes du clan régnant et les petits militants de quartier du Mps, oubliés après chaque guerre pour les premiers et chaque campagne électorale pour les seconds. Une insistante demande du partage du butin Tchad est réclamée, surtout que le pays venait d’exporter ses premiers barils de pétrole. La question qui se posait à un haut niveau de l’Etat était la suivante : comment intégrer à la fonction publique, plus particulièrement dans les régies financières, de milliers de jeunes, tout en donnant à cette politique un vernis légal ? En ces temps, les diplômés se comptaient sur les bouts des doigts et les jeunes boursiers envoyés à l’étranger , aux frais de l’Etat, revenaient bredouilles, sans parchemins, mi analphabètes mi lettrés, inutilisables dans l’appareil de l’Etat, surtout trop flagrant. Pour son retour dans la cour, le prince déchu et « Docteur en planification », sort de son chapeau un projet d’un cynisme rare pour un intellectuel : créer une institution d’enseignement supérieure pour blanchir cette vivier de jeunes prêts à l’emploi. Ainsi naquit « HEC » Tchad, qui aura d’importantes subventions publiques pour son démarrage et surtout, le terrain sur lequel elle est installée serait un domaine public, une « réserve » comme on dit au Tchad, sûrement cédée illégalement au franc symbolique. Le Dr Haggar pour faire accepter son projet adhère à nouveau au MPS, parti au pouvoir, dont il ne fait jamais mention de son appartenance. Il lui a été imposé surtout d’être le bras droit de Mme Hadja Haïgua Déby, dont il coordonne le bureau de campagne. Le prix pour éviter le déclassement.

Le planificateur de l’Etat néant.

La fin des années 2000 a vu les premiers diplômés de l’institut HEC déferlés dans l’appareil de l’Etat. À côté de jeunes toute somme brillant et d’enseignants dévoués et compétents, la majorité des étudiants de cette école sont formés au rabais, sans qualification technique et 99 % , incroyable statistique, valident leur licence. Il n’y a quasiment pas d’étudiants ajournés. C’est la preuve du caractère marchand et l’objectif de blanchissement des diplômes de cette institution. Dans un Tchad au fonctionnement normal, une inspection sérieuse du ministère de tutelle conduira à la fermeture de cette école.

Autre malhonnêteté intellectuelle de notre Dr, HEC a été recalée par une commission du CAMES ; commission qui a lui refusé le titre d’université et les agréments de ses diplômes, ce qui poserait de sérieux soucis à ceux qui veulent poursuivre des études à l’étranger. L’impact sur l’appareil de l’Etat est aussi terrible. De milliers de semi analphabètes ont aussi débarqué au coeur même de l’administration, aidés en cela en 2014, quand le Dr Haggar est nommé recteur de l’université N’Djamena, poste qu’il cumula avec celui de président de « L’université » HEC, une immorale prise d’intérêt qui lui permettait de faire authentifier diplômes et baccalauréats douteux. Le vol, le népotisme et la corruption généralisée n’ont jamais été aussi prégnants depuis l’apparition de ces instituts. Le Tchad de demain sera face à un dilemme politique et juridique cornélien : redresser un appareil de l’Etat pris en otage par de milliers de parasites avec un statut à vie de fonctionnaires, sans compétences techniques mais dont il est difficile de dénier l’authenticité du diplôme et surtout illégale de les chasser.

L’imposture et le double discours du vivre ensemble.

Ces dernières années, le Dr Haggar s’est découvert des qualités de philosophe et de « patriote ». Et s’est attaché d’attaquer de nouveaux ennemis : ceux « qui ont fui le pays » ou ceux qui ont « changer de pays ». Une référence sans ambiguïté à la diaspora, qu’il encense en privé et « qualifié de grenier » et attaqué en public pour la simple raison de porter un autre discours que celui officiel. Un discours à l’hypocrisie ambiante pour un homme qui s’est tû dans tous les grands drames et assassinats politiques de L’Histoire de ce pays. Un silence et une allégeance au MPS jusqu’à se taire quand l’injustice frappe sa propre famille, comme lors du limogeage brutale de son frère aîné et sultan, M. Bokhit Haggar et son remplacement par un cousin germain de Déby. Ou encore lors de l’enlèvement et à l’internement au bagne de Moussoro du Général Béchir Ali Haggar.

Le vivre ensemble, le service à la patrie et l’unité sont les voeux de tous les Tchadiens, tous sans exception aiment la paix, aiment servir leur pays et préfèrent l’unité à la guerre. Mais la justice, la juste répartition des richesses et la démocratie sont les conditions sine qua none pour consolider l’unité, la paix et le vivre ensemble. Ali Abderamane Haggar doit tenir un discours de vérité à la jeunesse Tchadienne à défaut de se taire et quitter la scène politique pour expier ses péchés. Changer le pays c’est bien, mais commencer par soi-même, son parti et sa famille est toujours mieux.

Charfadine Galmaye Salimi, le 30 Janvier 2020, Paris, France.

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